Les nouvelles de mai

The sound of silence

À l’heure où vous lisez cette lettre et bien ça y est, mon livre est sorti dans toutes les bonnes librairies, je suis pétrie d’angoisses mais j’essaie de rester zen. Présentement nous sommes mercredi soir et je pense à ce que je vais faire pour fêter ça (a priori, revoir Paper Moon de Peter Bogdanovich en mangeant des pancakes), je pense aussi à l’exercice très solitaire de l’écriture de ce livre. J’avais beau être très bien entourée, il ne restait que moi une fois les doigts posés sur le clavier. Et il ne reste que moi pour assumer ce livre, essayer de ne pas le regretter, pour même en être un peu fière qui sait. Who knows. 

Mon corps a décidé de m’offrir un petit cocktail inédit sponsorisé par l’anxiété pour fêter ça et notamment un bel acouphène qui me tient éveillée la nuit. Pendant ces bruyantes insomnies j’ai eu l’occasion de penser aux usages sérieux et parodiques de la chanson de Simon & Garfunkel The Sound of Silence. J’ai passé beaucoup de temps à regarder dans le vide comme Dustin Hoffman à la fin du Lauréat, à me dire que j’avais toujours pris le silence comme un acquis, comme on le fait avec tant de choses. Et un jour le silence se brise et il ne reste plus qu’à essayer de vivre dans le vacarme de son absence. Comme le chantait David Berman, When something breaks it makes a beautiful sound. Cela fait des années que j’ai une cicatrice dans mon œil droit, que j’ai fini par assimiler à mon champ de vision. C’est un petit bout de monde qui a disparu pour toujours, un petit trou noir qui est peut-être la porte d’un autre univers. Parfois j’essaie d’y plonger.

Peut-être que l’acouphène partira mais peut-être que, humaine comme je le suis, habituée à m’accomoder de tout, ce vrombissement fera un jour partie de ma musique intérieure.

Le silence, alors, ne sera qu’un lointain souvenir.

Ce que j’ai fait en mai :

📚 Oui donc j’ai sorti un livre, pfiou. Ça s’appelle Utopies féministes sur nos écrans, Les amitiés féminines en action, c’est sorti aux éditions Daronnes et la couverture est illustrée par ma BFF Aurore Carric. Ça parle des amitiés à l’écran avec un ton personnel et à la première personne cause that’s what I do ! Vous pouvez si vous avez envie le commander dans votre librairie préférée et même venir me voir pour en parler :

  • au lancement à la librairie Un livre une tasse de thé à Paris le 2 juin

  • à la rencontre/dédicace à Rerenga Wines (Paris) le 7 juin

  • et même à Brest dans ce lieu merveilleux qu’est le Refuge Royal, le 17 juin à 18h30. Vraiment, n’hésitez pas à venir !!

🎧 Si vous avez envie d’en savoir plus sur le livre, j’ai participé à la super émission de RFI Tous les cinémas du monde, ça s’écoute en podcast par ici.

🔥 Ce mois-ci j’ai écrit un article pour Madmoizelle sur la colère, pour lequel j’ai interrogé Mathilde Blézat qui a écrit un super livre sur l’auto-défense féministe et Taous Merakchi qui a publié le texte autobiographique Vénère, Être une femme en colère dans un monde d'homme. Vous pouvez lire l’article .

✊ Pour la newsletter de Women Who Do Stuff du mois on a interrogé Noémie Trovato qui est en deuxième année de master en sociolinguistique à la Sorbonne Nouvelle et qui nous a parlé du procès Depp vs Heard et de ce que ça nous dit sur un backlash post-#metoo. À lire par là.

📚 Juste un post sur mon blog culturel ce mois-ci mais ce n’est pas trop grave, j’y ai parlé de plein de choses qui m’ont plu ces dernières semaines : le film japonais Tampopo, la BD de Catherine Ocelot Symptômes (éditions Pow Pow), la série Heartstopper (j’ai bien envie de me lire les BD maintenant), le nouvel album de Belle and Sebastian… Par !

💞 Pour La ville brûle j’ai discuté avec Claire Pommet et Pauline de Tarragon de leur premier album jeunesse ensemble. On a parlé de littérature jeunesse inclusive et de petits animaux mignons. Ici !

À voir / à lire :

📺 Je ne l’ai pas encore regardé, mais Arte a diffusé un documentaire sur Barbra Streisand. À mon avis c’est bien, et dans tous les cas on ne regrette jamais de regarder Barbra sur un écran car on l’aime très fort.

🎶 La première nuit de mon acouphène j’ai écouté I can hear the heart beating as one de Yo La Tengo (je sais que j’en ai déjà parlé le mois dernier, mais dommage il n’y a pas de bureau de réclamations dans cette newsletter !!) et j’ai lu cette belle interview de James McNew chez Aquarium Drunkard qui raconte des anecdotes sur chaque morceau de l’album. Il y parle de leur processus créatif, de cette fois où la mère d’Ira est venue chanter My Little Corner of the World sur scène avec eux, du clip de Sugarcube, de leurs expérimentations permanentes dans lesquelles ils se lancent en toute détente. C’est rare que je dise de quelque chose qu’il est “inspirant”, n’étant pas la personnification d’un reel instagram de développement personnel, mais l’existence même de ce petit miracle qu’est Yo La Tengo m’inspire vraiment. True love lasts a lifetime.

🥢 J’ai vu le film japonais Tampopo ce mois-ci, qui m’a fait réfléchir à la manière dont on peut bien filmer le plaisir de manger. Et puis j’ai lu la BD Le goût d’Emma (écrite par Emmanuelle Maisonneuve et Julia Pavlowitch, illustrée par Kan Takahama) qui raconte l’histoire de l’une des premières inspectrices du guide Michelin, et retrace sa passion pour la gastronomie avec beaucoup de sensibilité. Ce que j’ai aimé particulièrement c’est son coup de foudre pour la cuisine japonaise et notamment pour les plats qu’elle goûte dans les temple et qui respectent le goût des légumes. Tout ça pour dire que j’ai été très intéressée par cette interview croisée de Benoît Peeters et Emmanuelle Maisonneuve menée par Amandine Schmitt dans l’Obs (2018) sur les manières de représenter la gastronomie en BD.

🦊 “Si nous refusons alors ce monde d’hommes et de femmes, de Blancs et de non Blancs, de bourgeois et de prolétaires, comment ne pas rejeter, dans le même mouvement, ce monde d’humains et d’animaux ? Plus encore, si nous réfutons la domination de genre, de classe, de race, comment continuer à admettre la domination d’espèce ?Très beau texte de Kaoutar Harchi du côté de Ballast, sur la question des animaux.

💞 Je vous conseille d’aller jeter un œil du côté du crowdfunding de la BD de Joanna Folivéli Devenir. Je suis très très fan de son travail et cette BD s’annonce sublime.

💼 Et sinon un angle super chouette dans le Guardian : pourquoi de plus en plus de séries critiquent-elles le travail ? (peut-être parce que c’est de la merde ? Je propose) Le papier parle beaucoup de Severance sur Apple TV, vraiment ma série coup de cœur de ces derniers mois, hautement recommandée.

En bref :

🎶 En préparant la newsletter de La ville brûle sur l’album jeunesse dessiné par Pauline de Tarragon, j’ai commencé à écouter son projet musical Pi Ja Ma. Depuis j’écoute en boucle son disque Seule sous ma frange, qui vient de sortir et qui ma foi mixe pas mal de mes émotions pref : un peu de tristesse, un peu de joie démesurée, de la mélancolie, et un humour chelou. Bref, Destination l’amour est un peu mon tube de l’été à moi.

🖍 J’ai lu la première BD de Mathilde Payen, La fête est finie (éditions Sarbacane) qui est sacrément bien. Elle raconte la mélancolie fin des études et ce moment où on arrive pas vraiment à faire ce qu’on a envie de faire, où on se compare aux autres, où on ne sait pas trop bien ce qu’on veut faire de sa vie. Et elle décrit aussi bien ce milieu un peu snob de la culture, dont on arrive à s’extraire à un moment (je vous le souhaite du moins). Le dessin est vraiment magnifique.

On finit avec une citation sous forme de BD cette semaine, issue de Symptômes de Catherine Ocelot (éditions Pow Pow) :

See you le mois prochain !