Les nouvelles de janvier

Depuis plusieurs jours, je me répète en boucle “tu ne râleras pas sur le mois de janvier dans ta newsletter”. Alors pour m’inspirer j’essaie de penser aux petites joies récentes comme par exemple de voir la neige en ouvrant les volets au réveil (et à Brest ça n’arrive pas tous les jours). Mais voilà, ça ne me tiendra plus que deux lignes. Alors je me suis dit que j’allais parler de l’une de mes plus grandes joies de ce mois de janvier : revoir The Ghost and Mrs Muir de Joseph L. Mankiewicz avec mes deux chats sous mes deux plaids.

Si vous ne le connaissez pas, ce film raconte l’histoire d’une femme dont le mari est décédé récemment et qui décide de changer de vie et de s’installer en bord de mer avec sa fille. Une idée qui ne plaît ni à sa belle-famille ni à l’agent immobilier de la petite ville côtière qui veut l’empêcher de louer une maison “hantée”. Et il se trouve que la maison est bien hantée par le fantôme d’un marin joué par Rex Harrison qui est assez irrésistible (il a tout au long du film la même tête que Jerry Seinfeld quand il essaie de ne pas rire aux vannes d’Elaine et George). Mrs Muir et le marin se lient d’amitié et elle commence à taper pour lui ses mémoires. L’écriture est centrale dans le film : le marin résuscite à travers l’écriture du manuscrit et écrire donne à Mme Muir une raison d’être.

Je crois bien que ce film a changé ma vie et qu’il fait désormais partie de moi comme peu d’autres. Il est rangé dans ma mémoire à côté du souvenir des odeurs agréables et des moments doux. Je fais appel à Mrs Muir quand j’ai des blocages d’écriture mais aussi des angoisses existentielles. À chaque fois que je vois ce film, il ouvre une nouvelle porte sur le sens de la vie. Alors oui, il peut être vu comme un film léger, une comédie, mais à mes yeux il vaut vraiment tous les trésors de profondeur du monde et ce sont presque ses passages les plus légers qui sont les plus vrais. Mrs Muir arrivant près de la mer et se fendant d’un sourire satisfait. Son enthousiasme presque enfantin chez l’éditeur. J’aspire à la simplicité et à la profondeur de son histoire : une petite maison près de la mer, une femme éprise de liberté, un fantôme amoureux. And scene.

Ce que j’ai fait en janvier :

📚 Et bien pas grand chose ! Enfin si, plein de choses mais rien de vraiment concret à montrer comme souvent. Alors je vais vous partager cet article super chouette qui parle de mon livre paru sur le blog Bibliolingus !

🔥 Pour La ville brûle j’ai écrit sur la superbe première BD d’Adlynn Fischer, une histoire très forte sur l’adolescence, sur la rage, sur l’identité, sur l’amitié — bref, lisez-la ! Et c’est sa première BD ! Dans la newsletter j’ai aussi parlé de Travolta et moi de Patricia Mazuy, une autre œuvre merveilleuse qui parle de feu et d’adolescence, l’occasion était trop belle. À lire ici !

📖 Hélène m’a invitée à parler d’un livre sur l’amitié pour sa super newsletter la Bibliotrice (abonnez-vous !). J’ai choisi Sula de Toni Morrison, un roman que j’adore. Par ici par là !

🎬 J’ai trouvé très intéressant l’article de Mona Chollet publié sur son blog qui revient sur l’affaire autour du film de Valeria Bruni-Tedeschi Les amandiers, sur les rapports de pouvoir au sein de l’histoire qu’il raconte. Et j’ai aussi aimé cet article de Serge Bozon du côté de SoFilm sur le métier d’acteurice. Il a de nombreuses réflexions sur l’intensité que l’on demande aux comédien·nes (mais ça m’a agacée qu’il ne cite que des acteurs américains et aucune actrice quand Ingrid Bergman existe, mais passons).

👯‍♀️ Côté comédie musicale j’ai écouté cette série documentaire sur l’histoire de Chantons sous la pluie qui était super et qui donnait envie de rerererevoir le film (merci Emeline de m’avoir rappelé son existence !). Et sinon les copines de All That Jazz ont sorti un épisode sur l’un des plus beaux films au monde, A Star Is Born de George Cukor.

💗 Bientôt prête à faire du porte-à-porte pour faire la réclame du nouveau disque du meilleur groupe au monde, Yo La Tengo ! Have you heard about our lord and savior Ira Kaplan ? J’ai beaucoup aimé cette interview menée par Philip Sherburne pour Pitchfork. Ils y parlent notamment beaucoup de la longévité de leur carrière, de leur spontanéité et de la manière dont ils ont réussi à éviter l’ambition et c’est une interview qui m’a fait beaucoup de bien en cette période de ghosting professionnel. Simplement mes héros.

👀 En parlant d’ambition et de carrière, j’ai aussi aimé cet article de Yasmine dans sa newsletter qui parle de travail et de la place qu’il prend dans nos vies et j’ai beaucoup pensé par la suite aux “interstices” trop petits que représentent les moments off.

✏️ Toujours sur l’ambition, dis-donc c’est comme si j’avais une petite obsession en ce mois de janvier, j’ai vraiment aimé ce premier épisode du podcast de l’autrice Marcia Burnier sur l’écriture. Ça parle de l’injonction de créer tout le temps, de la réalité matérielle de l’écriture, de faire dix mille dossiers de projets en attendant que l’un d’entre eux soit validé et d’être mère et autrice. Très recommandé !

🥮 J’ai évidemment aimé cet article sur le kouign-amann publié sur le New York Times qui raconte comment on peut surmonter ses traumas en cuisinant. Évidemment le kouign amann est un sujet particulièrement sensible pour moi puisqu’une partie de ma famille vient de Douarnenez (la capitale du kouign amann) et que c’est un gâteau que ma mère nous faisait régulièrement. Un gâteau qui pour moi a le goût du souvenir.

📕 Côté BD, deux très bons articles de Jérôme Lachasse à lire : sur la représentation des personnages noirs en BD et sur le changement de perception des œuvres selon les époques (ça part de l’affaire dont on a beaucoup parlé ces dernières semaines).

🎧 En janvier j’ai beaucoup écouté Emile Mosseri, ses BO (de Minari et Kajillionaire) mais aussi son album avec Kaitlyn Aurelia Smith I Could Be Your Dog / I Could Be Your Moon. C’est vraiment très bien et ça apaise un peu le cœur en ces journées froides et longues. (et j’avais dit que je ne me plaindrais pas de janvier)

📽 Ce mois-ci j’ai regardé et aimé le film d’Ida Lupino The Hitch-Hiker, qui est disponible en ce moment sur le site d’Arte. Une prise d’otage sous forme de road trip avec un méchant vraiment flippant. Les images sont super belles et en plus ça dure moins d’1h30, quand même un avantage in this economy. Après ça on lit dix pages et hop, au lit.

📺 Si vous cherchez une série sympathique à regarder, je recommande Reboot sur Disney+, qui raconte le tournage de la suite d’une sitcom, c’est assez méta et même si ça ne va pas assez loin à mon goût, ça a du potentiel. Et la série a le mérite de mettre en scène le fossé entre deux générations de comédien·nes, un sujet que je trouve hyper intéressant (et que Hacks, une de mes séries chouchou, exploitait super bien). Et puis si vous êtes comme moi peut-être que ça vous suffira de savoir qu’on y voit Keegan-Michael Key ?

Et je vous laisse avec ma star Ira Kaplan de Yo La Tengo qui dit dans son interview pour Pitchfork :

Et vivement février !